Humeurs taurines et éclectiques

mardi 17 juillet 2012

Quand les «zantis» avaient de l'esprit...

Gravure illustrant l'article du "Monde Illustré" de 1868
Ironique, fin, bien écrit dans un français correct, la critique anti-taurine de 1868, c'était quand même autre chose! On est loin de la vulgarité, de l'injure, de la haine brute et sommaire de nos contempteurs contemporains et de leurs slogans simplistes.
L'humour, quelle meilleure arme?
Mais est-ce vraiment complètement «una broma»? Il y a bien eu corrida à Bilbao, le dimanche 8 juin 1868.
En ces temps «héroïques» on voyait de tout dans les arènes, depuis les «Don Tancredo» qui s'exposaient immobiles sur des piedestaux, maquillés en statue de Cid psychédélique (lire J. VIDAL à ce sujet), jusqu'à des confrontations hallucinantes entre un toro, un lion ou un éléphant, voire une meute de molosses.
En 1977, dans un village des Urdes, lors d'une fête de village, j'ai bien vu piquer un morucho depuis une remorque de tracteur!

Les vélocipèdes et les courses de taureaux
Bilbao, 8 juin 1868

Monsieur le Directeur,
Au moment où l'on s'occupe sérieusement en France des vélocipèdes, je crois vous être agréable en vous signalant un emploi très original de cette ingénieuse machine, dans la ville de Bilbao, aux courses de taureaux qui ont eu lieu le 7 juin. Désormais, si cet usage se généralise, on ne pourra plus considérer les combats de taureaux comme un spectacle de sang et d'horreur, indigne d'un peuple civilisé.
Le vélocipède a remplacé le cheval dans les courses de taureaux et nous avons vu, avec admiration, un jeune homme intrépide, vélocipédiste de première force, combattre un taureau en costume de picador, et, la lance au poing, se présenter en face de l'animal furieux aussi tranquille que s'il eût monté le meilleur cheval de Cordoue.
Comme il ne pouvait s'arrêter, sous peine de perdre l'équilibre, c'était un spectacle curieux de le voir tourner deux ou trois fois sur lui même, afin de pouvoir se trouver en face du taureau furieux qui parvint à le renverser, mais qui, blessé au cou par la pique du picador, fut contraint par la douleur à prendre la fuite.
Le public applaudissait frénétiquement au sang-froid du jeune homme et à la merveilleuse adresse avec laquelle il manoeuvrait son vélocipède, et l'on se demandait s'il ne serait pas possible de remplacer les chevaux par de semblables machines qui éviteraient le spectacle horrible de la mort de ces malheureuses bêtes, trop souvent offert aux spectateurs des courses.
La photographie que je vous adresse est d'un photographe de notre ville, Monsieur Pica-Groom.
Recevez, etc.
Batisto de Leguina

NOTA: Pica-Groom a vraiment existé, il s'agît d'Eduardo López de Ceballos y del Hoyo (pseudonyme acronymique Campogiro). Photographe de Santander, établi également à Valladolid et dans les Asturies. Il fut l'auteur de beaucoup des plus anciennes photographies de Santander et de sa province, qu'il publia dans un célèbre album. Il se faisait appeler «photographe officiel du Vice-roi d'Egypte».
Par contre, aucune trace de Batisto de Leguina...

Cliché de Pica-Groom





1 commentaire:

Marc Delon a dit…

Ce n'est pas de l'humour, on dirait... la demande semble sérieuse et on note que ces anti-là ne plaignaient pas encore le toro mais seulement le cheval.